RDC : Histoire du M23 c’est finie ? OK, mais après, on fait quoi ?

25 novembre 2013

RDC : Histoire du M23 c’est finie ? OK, mais après, on fait quoi ?

 

Anciens miliciens dans le centre de regroupement de Bweremana. Credit photo: Maud Julien

L’euphorie est à son apothéose au Congo. Louange, gloire, honneur au maître des temps et de circonstances. Dieu tout puissant. Il a exaucé nos prières. Les ennemis de la République sont partis. Finie l’humiliation, Bravo l’armée. Nous avons gagné. Vive l’armée congolaise. Vive le grand Congo. 05 novembre 2013, date fatidique et mémorable en terre de Lumumba. Elle correspond au jour de la victoire de l’offensive des forces loyalistes, les FARDC et de la force onusienne (Brigade d’intervention) sur les rebelles du M23, dans le territoire de Rutshuru au Nord-Kivu.

Nous avons la victoire en main; mais on ne sait trop quoi en faire car, en apparence,  nous n’étions pas préparés. C’est cela la vie d’après guerre au Nord-Kivu. « Gérer c’est prévoir, organiser, contrôler, coordonner et commander », selon Henri Fayol. Surtout quand il s’agit de la gestion d’une grande entreprise comme l’appareil étatique. Il faut des vertébrés tenaces pour gérer un vaste Etat comme le Congo, entouré de neuf pays voisins et d’une superficie équivalent plus de quatre vingt fois le Royaume de Belgique, 2.345.409 km².

Depuis lors, silence radio. On traîne les pieds. Le temps est s’est arrêté. Place à des tournées sans programme dans les provinces de la république très très démocratique du centre de l’Afrique. Le temps c’est moi. Dixit le Roi. 

Deux facteurs majeurs peuvent amener à conclure que Kinshasa, la capitale, le siège des institutions s’endort sur ses lauriers. C’est pourtant trop tôt.

Aucun programme en vue pour encadrer les miliciens qui se rendent

Vingt-un jours après la victoire inédite des FARDC sur les M23 , dans la foulée, près de vingt milices locales armées (Mai-mai Nyatura, FDIPC, NDC, APCLS, axe bord du lac, etc) se sont déjà rendus dans les bases des FARDC ou celles onusiennes et tous, expriment l’intention d’intégrer l’armée régulière congolaise ; bien sûr au cas par cas et après analyse minutieuse à en croire des sources de la Monusco.

En faisant un tour dans un grand centre de regroupement, la base de Bweremana à Masisi dans le Nord-Kivu, où sont cantonnés les quelques milles cinq cent rendus selon le ministre de l’intérieur, Richard Mangez, l’on réalise rapidement que rien n’est fait ni planifié pour fixer le sort de ces jeunes gens dans le délai.  

Jean Bosco (nom d’emprunt), leader de l’ancienne milice FDIPC (Force de défense des intérêts du peuple Congolais, NDLR) vient de faire deux semaines à Kashovu, dans les collines surplombant la cité de Bweremana au bord du merveilleux Lac Kivu.

A la question de savoir, pourquoi vous, dans ce centre ? Il répond :

« Je suis congolais de souche. J’ai pris les armes pour défendre Rutshuru, mon territoire d’origine contre l’agression rwandaise par M23 interposé. Les militaires loyalistes étaient absents dans mon village. Je suis un ancien combattant et j’ai imaginé des stratégies pour avoir des armes pour protéger les miens. Je tendais des embuscades la nuit aux rebelles du M23 et ça marchait très bien. Nombreux d’entre eux ont péri comme ça. Et j’ai accumulé beaucoup d’armes comme ça. Depuis que l’autorité de l’Etat est rétablie chez nous, mes hommes de troupes (200 nous a fait savoir, le colonel FARDC, Banza qui enregistre les rendus au centre de regroupement de Bwemremana) et moi avions pris l’initiative de nous rendre à l’armée régulière pour faire œuvre utile partout au pays. La défense et l’intégrité du territoire en RDC.

Es ce par manque d’emploi ou simple patriotisme. Et comment vous vivez ici dans ce camp ?

« Le FDIPC n’est pas un groupe armé mais une milice d’autodéfense, il y a une nuance entre les deux termes. Nous sommes de patriotes et nous avons le souci de ce pays. Le protéger contre toute agression extérieure. Nous sommes des patriotes. Nous voulons juste servir sous le drapeau. Mais il revient à la haute hiérarchie de nous le confirmer. Un militaire ne se plaint jamais de conditions de vie lui imposées. Cela fait partie de la formation. La discipline c’est notre devise chère. Mais nous mangeons, vivons en parfaite collaboration avec les membres d’autres milices qui sont venues de Masisi. »  Hors-micro, il nous informe que les soins de santé sont quasi inexistants et très précaires ; que les besoins alimentaires sont couverts à moitié.

A quand l’Intégration ou la démobilisation des rendus ?

La journée, dans la cour, tous les rendus suivent des formations et entraînements militaires les livrés par les instructeurs des FARDC.

Aucune grande salle bien aménagée pour les cours, pas de chaise, pas de table, pas d’installations hygiéniques propres, pas de motivation pour les formateurs, bref des conditions de travail qui laissent à désirer. Un vrai sacerdoce et pour les enseignants et pour les enseignés. Du coup, les cultures des paysans en paient les frais. Ils (paysans) sont très nombreux, à décrier le pillage de leurs récoltes (Haricots, mais, manioc) par des nouveaux arrivants et leurs dépendants.

Et comme il fallait s’y attendre, la population dénonce cette nouvelle forme de tracasserie leur imposée et demande leur transfèrement dans d’autres milieux.

Anciens combattants Nyatura en train de faire la cuisine à Bweremana au Nord-Kivu.                             Credit photo: Maud Julien

Seront-ils tous réintégrés, démobilisés pour revenir à la vie civile pour être recruter normalement dans l’armée congolaise ? Si oui quand ? Si non qu’en ce qu’on en fait ? Visiblement, il faut être dans le secret de Dieu pour le savoir. Et l’opposition, et la majorité, et les forces vives de la nation conservent le français dans leurs poches. C’est une question taboue et/ou sensible. C’est déplorable. Mais on espère encore. Car tant qu’on vit, gardons espoir pour un avenir radieux, disent les sages.

Que d’atermoiements sur la suite de Kampala

Près d’une année déjà, Ça piétine. Le dialogue, pourparlers, assises, concertations ou réunions bipartite, c’est selon.

A en croire le gouvernement congolais : rien ne sera signé à Kampala. Nous avons le contrôle de notre espace jadis usurpé. Pourquoi signer ? La rébellion du M23 n’est que l’ombre d’elle-même. Une fiction de rien du tout. Une histoire enterrée. Bravo, dit l’opinion publique congolaise. Mais n’oublions pas très vite que leurs troupes sont cantonnées dans les républiques voisines : le Rwanda et l’Ouganda. Les enfants prodigues on en a fait quoi ? Là c’est le silence radio. Le Congo navigue à vue.  Pas de préparation. Aucun plan en vue, j’imagine en soliloque ce que nos autorités pensent : attendons voir ce que pense ou prévoit la Monsuco (Mission de l’Onu pour la stabilisation du Congo). Non de Dieu, décidément qui gère le Congo ? Dites-le nous ouvertement chers Messieurs, excellences, révérends, vénérables, etc. dignitaires congolais. Chère Monusco, je vous en supplie, attendez voir ce que pense notre gouvernement « légitime » avant de travailler à leur place. Vous en avez déjà fait trop pour ce pays. J’ai dit.

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